Le désastre des cours histoire

Article d'Antoine Béland, étudiant de 5e secondaire, paru dans Le Devoir le 1 décembre 2010

Au cours des derniers jours, plusieurs articles et reportages ont fait le constat du piètre état de l'enseignement de l'histoire dans les établissements collégiaux du Québec. Lors de chacune de ces interventions, il est spécifié que l'histoire du Québec, plus précisément, est le parent pauvre du système. Marie-Andrée Chouinard, dans son éditorial du 26 novembre 2010 publié dans Le Devoir, cite le rapport Lacoursière publié en 1996: «Comme aucun cours n'est obligatoire pour l'ensemble des élèves du collégial, il en résulte que la vaste majorité des techniciens, des médecins, des ingénieurs, des journalistes et des artistes récemment diplômés ou en voie de l'être n'ont eu ou n'auront eu pour toute formation historique et civique que les cours d'histoire du secondaire.»

Étant moi-même étudiant en cinquième secondaire en concentration histoire dans un collège privé de l'île de Montréal, ainsi qu'un passionné d'histoire, je ne peux qu'être en accord avec une meilleure éducation sociale des jeunes et une plus forte représentation de l'histoire, et plus particulièrement celle du Québec. La volonté d'éduquer les jeunes et de leur apprendre d'où ils viennent et les personnages importants qui les ont précédés ne peut qu'être admirable, et je m'incline devant celle-ci.

Voici pourquoi les cours d'histoire du Québec au secondaire me font littéralement honte. Le principe du programme est simple: en troisième secondaire, l'élève fait l'acquisition de compétences intellectuelles liées à la citoyenneté par le biais de l'étude de l'histoire du Québec, des premiers occupants jusqu'à aujourd'hui. Pas de problème. C'est en quatrième secondaire que ça se gâte. Les élèves se retrouvent en effet à revoir exactement les mêmes notions, les mêmes éléments historiques, les mêmes périodes, avec, selon le ministère de l'Éducation, des points de vue, des éclairages différents.

Concrètement, l'élève se voit contraint d'étudier l'histoire du Québec deux fois en accéléré, plutôt que d'étudier en détail la première moitié durant la première année et la deuxième moitié durant la deuxième année. Les professeurs de quatrième secondaire sont aussi aux prises avec une situation embarrassante, alors que leurs élèves connaissent déjà toute la matière qu'ils auront à enseigner dans l'année.

Ce programme est un échec, considérant que les élèves se désintéressent totalement de l'histoire du Québec, trouvant les cours inutiles, car trop semblables à ceux de l'année précédente, et que les professeurs sont mal à l'aise devant un programme qu'ils n'arrivent pas à vendre à leurs élèves et qu'ils trouvent eux-mêmes, dans certains cas, non pertinents. De plus, rien n'est abordé en profondeur, et le XXe siècle, le plus important car le plus proche de nous, est étudié à la va-vite juste avant les examens.

Le vrai problème est donc là, dans la mauvaise qualité de la formation secondaire. Si les élèves du Québec avaient une excellente éducation à la citoyenneté dès leur sortie du cours secondaire, je ne verrais pas le besoin de cours d'histoire du Québec au collégial. Il est évident qu'il existe deux façons diamétralement opposées de voir le problème, et que la thèse contraire à la mienne pourrait être défendue. Mais le cours collégial, s'il est «la dernière véritable occasion de formation fondamentale», comme le cite Le Devoir à partir du rapport Lacoursière, n'est-il pas aussi le début de la formation professionnelle et, pour certains, le lieu de l'apprentissage d'un métier?

Des cours d'histoire au collégial seraient, dans plusieurs cas, inadéquats. Or, pour les jeunes adolescents encore verts du cours secondaire, avoir une formation solide en histoire du Québec ainsi qu'une excellente éducation citoyenne ne serait-il pas de la plus haute pertinence? La question est lancée et elle mérite d'être examinée.