Article d'Isabelle Légaré paru dans Le Nouvelliste le 3 décembre 2009
S'inspirant du dicton voulant qu'«Il faut savoir d'où l'on vient pour savoir où l'on va», la Coalition pour la promotion de l'enseignement de l'histoire au Québec s'est arrêtée, hier matin, dans les locaux de la Société Saint-Jean-Baptiste de la Mauricie pour réclamer une révision en profondeur du contenu des programmes d'histoire qui sont enseignés dans nos institutions scolaires.
Lui-même enseignant au département de géographie, histoire et politique du Cégep de Trois-Rivières, le président de la SSJB de la Mauricie, Yves Saint-Pierre, déplore ce «glissement important vers le tout pédagogique», a-t-il commenté en expliquant que les enseignants ont été appelés au fil des réformes à mettre leurs connaissances de côté pour devenir des experts en pédagogie.
«L'enseignement est aujourd'hui axé sur le vécu de l'élève. Le prof est devenu un guide», a-t-il dit avant d'ajouter que cette orientation n'est pas sans impact. Dans un même souffle, M. Saint-Pierre souhaite que ses collègues du primaire et du secondaire puissent évaluer les connaissances acquises de leur élèves, et ce, au même titre que les compétences qui ont davantage été privilégiées par la réforme de l'éducation des dix dernières années.
Qui plus est, les dimensions historiques sont mises de côté pour faire place à la promotion du multiculturalisme. «On évacue les bases de notre histoire nationale», constate-t-il en précisant que des dates et des moments importants de l'histoire du Québec ne sont tout simplement pas abordés dans les classes. «Comme nation, on ne transmet pas notre culture et notre histoire commune», se désole M. Saint-Pierre qui soutient que les nouveaux arrivants auraient tout intérêt à être initiés à l'évolution de leur terre d'accueil, une étape qui faciliterait leur intégration.
«Si on veut que les nouveaux arrivants comprennent le Québec et ses valeurs, ils doivent d'abord connaître son histoire», a renchéri Mario Beaulieu, président de la SSJB de Montréal d'où origine la création, en août dernier, de la Coalition pour la promotion de l'enseignement de l'histoire au Québec.
L'histoire, c'est notre mémoire collective», a déclaré M. Beaulieu. À l'instar de Laurent Lamontagne, président de la Société des professeurs d'histoire du Québec, il invite la population à signer une pétition qui propose seize mesures susceptibles de hausser le niveau moyen des cours d'histoire dans tous les ordres d'enseignement.
Insistant sur l'importance et l'urgence d'appuyer cette action qui se veut non partisane, M. Beaulieu a rappelé qu'une première coalition formée au milieu des années 90 avait amené le gouvernement de Jacques Parizeau à mettre sur pied la Commission Lacoursière. Or, si des améliorations avaient été constatées à l'époque, Mario Beaulieu parle aujourd'hui d'une dérive majeure dans l'enseignement de l'histoire nationale.
Professeur associé au département d'histoire de l'Université du Québec à Montréal et directeur du Bulletin d'histoire politique, Robert Comeau était également présent à cette conférence de presse pour demander que les élèves de la 3e année du primaire à la 5e année du secondaire puissent recevoir annuellement 100 heures d'enseignement de l'histoire. Il se dit aussi grandement préoccupé par l'absence d'un cours d'histoire obligatoire au niveau collégial où les étudiants n'ont pas la possibilité d'approfondir les fondements historiques du Québec.
M. Comeau est persuadé que les parents des élèves du primaire et du secondaire réagiraient s'ils prenaient connaissance du contenu historique qui est dispensé dans les écoles du Québec. Un «flou total», observe l'historien qui, en plus de réclamer une révision des programmes scolaires en histoire, demande la création d'une cinquième section de l'Institut national de recherche scientifique (INRS) consacrée à l'histoire politique.